Dès son discours d’intronisation à la présidence du CDH, voici trois semaines, Maxime Prévot a choisi de placer cet accent : « Je veux que nous soyons bien plus attentifs aux enfants et adultes handicapés. Je n’ai jamais compris que l’on consacre si peu de moyens à ceux qui constituent certainement parmi les plus faibles de notre société. » Plutôt inédit pour un président de parti. Mais avec lui à sa tête, le parti humaniste entend faire du dossier « handicap » une priorité. Qu’il défendra, affirme-t-il, aux tables de négociations auxquelles il sera convié.
Le CDH organise ce samedi à Bouge (Namur), comme le week-end dernier à Bruxelles, un « Forum handicap ». Pourquoi cet intérêt pour un dossier que le politique met rarement en avant ?
Le CDH est probablement le parti qui, de longue date, s’est le plus sincèrement et concrètement engagé pour la cause du handicap. 15 % des Belges sont concernés par le handicap soit permanent, soit temporaire, à la suite d’un handicap de naissance, d’un accident ou de la perte d’autonomie due au vieillissement. C’est tout sauf anecdotique et on doit le mettre à l’agenda politique. Or, on en fait souvent une considération marginale plutôt qu’une priorité de l’action sociale. Pourtant, un Européen sur quatre a dans sa famille quelqu’un concerné par le handicap. Et pour ces familles, cela génère souvent des défis quotidiens immenses. Lorsque j’étais ministre wallon de l’Action sociale), j’ai débloqué des moyens inédits. Et depuis 2014, nos ministres font bouger les lignes.
Vous avez aussi été personnellement sensibilisé au sujet.
J’en ai parlé dans mon discours d’installation car c’est aussi le fruit de mon histoire personnelle : j’ai été confronté au handicap physique et mental au sein de ma famille proche depuis toujours, ce qui a entraîné une prise de conscience précoce des difficultés pour mes grands-parents, dont j’admire l’engagement sans faille. Jusqu’à son décès à 93 ans, ma grand-mère a pris soin de son « gamin » de passé 50 ans, mon oncle. Et ma mère, mon frère et moi, nous nous sommes engagés à prendre soin de mon oncle, qui est hébergé en institution.
Maintenant que je suis président du CDH, je souhaite mettre le handicap au top des priorités sociales, car c’est aussi un enjeu de société. J’apprécie l’approche canadienne, qui part du principe qu’il n’y a pas de normalité, que chacun avec ses particularités prend part à la construction d’un projet sociétal commun.
Pourquoi le handicap n’est pas un sujet de société, et politique, chez nous comme au Canada ?
Je ne m’explique pas que l’on ait eu jusqu’ici si peu de considération pour le sujet. Je crains que les familles concernées mobilisent à ce point leur énergie pour leurs enfants handicapés qu’elles n’aient pas de temps à consacrer à lobbyer ou conscientiser. Et il y a probablement une responsabilité du monde politique qui, par facilité, a préféré évoquer, dans la politique sociale, l’enjeu des personnes sans emploi ou hyperprécarisées. 50 débats sont menés sur le pouvoir d’achat pour un sur le handicap.
Les personnes handicapées sont les oubliés de la politique ?
Oui. D’où mon coup de gueule qui est un acte de conviction : le CDH veut faire de la politique de la santé et du handicap enfin une priorité politique. Il y a trop de familles impactées et qui se sentent négligées. Quand on n’est pas impacté, on a parfois du mal à se projeter. Et cela dessert probablement le monde du handicap, alors que tout le monde se sent concerné par le pouvoir d’achat. C’est aussi notre devoir au CDH et le mien de le remettre à l’agenda politique.
Avec les ministres CDH, nous avons pris des mesures inédites sous cette législature mais un immense travail reste à faire. J’appelle donc à en faire collectivement une priorité. Ce sera le cas du CDH, mais ce doit l’être des autres partis aussi. Il faut que ce soit à l’agenda politique.
Donc vous en ferez une priorité lors de la formation des prochains gouvernements ?
Oui. Ce doit être une priorité. Si la prochaine législature peut débloquer 100 millions pour améliorer le bâti et créer de nouvelles places, revoir à la hausse les normes d’encadrement, accompagner les personnes handicapées en préparation au vieillissement, augmenter l’offre de répit, obtenir du fédéral que l’assurance maladie prenne en charge les coûts de logopédie et psychomotricité pour les personnes autistes, augmenter les places en classes inclusives et améliorer le transport scolaire : ce sont en tout cas sept chantiers majeurs que le CDH veut mettre à l’agenda.